Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Triptyque

En avoir le coeur net...

 

Résumé

Roucoulades et confidences à Paris. Mais la dernière nuit est gâchée par Françoise. Ce grand amour survivra-t-il à un fiasco ?

 

Présentations en série – Dessins de femmes – Inspiratrices – Lune de miel à distance – Private joke – Tourments et baisers – L'antique mécanisme – Des trésors bien cachés – Montée d'adrénaline – Futur flou – Un billet pour Grenade.

 

De retour au Venezuela, je retrouve « Marjolaine » tard dans la nuit. Sur la table à cartes il y a le poème qu’elle m’a transmis et un petit mot de sa main qu’elle a laissé avant d’embarquer avec « l’autre ». « merci encore pour l’hébergement, dommage pour notre histoire… je te rembourserai l’argent, j’étais un peu juste. » Il s’agit des cinquante euros que je lui avais laissés. Elle n’a pas eu scrupule à les prendre. Il y a un post-scriptum : « as-tu vu que le poème nous était destiné ? je pensais que tu en aurais saisi la sensibilité. dommage ».

C’est sans doute le seul exemplaire que j’aie de son écriture. Elle a signé d’une façon étrange, avec un tout petit « s » au début. Ce ne peut être par modestie. Une coquetterie d’artiste, peut-être.

Les derniers jours à Paris ont été bien employés. Nous sommes allé voir Le Banquet de Platon au Louvre. On s’est promené le long du Canal Saint-Martin où se tenait une exposition d’art contemporain. On a dîné chez Philippe. On a rendu visite à Isabelle avant de se rendre avec Mathilde au Musée Carnavalet. Le hasard a voulu qu’y soit exposée une toile représentant Madeleine Duvernay, la fille de la grande Suzanne Duvernay, actrice comme elle, et donc l’une des aïeules de Mathilde du côté des femmes par son père. Mathilde est démesurément fière de cette ascendance. En découvrant le tableau, assez médiocre, elle m’a appelé à grands cris. Samia a douté, mais Mathilde, qui connaît par cœur la généalogie de la famille Duvernay-Broussard-Dallouste, l’a convaincue. Il a été décidé d’aller le lendemain au Grand Palais, où il y a d’autres tableaux qu’on peut appeler « de famille ». Une queue de quelques centaines de mètres nous en a dissuadé. On s’est contenté du nouveau Musée des Arts Premiers, dont j’ai pensé beaucoup de mal, sans le dire.

Valentine a appelé, apprenant l’existence de Samia par Mathilde. Pour cacher sa gêne, elle a choisi la pitrerie : puisqu’elle vient d’avoir un nouveau père, autant faire connaissance de sa maîtresse en titre ! Samia et Valentine ont tout de suite sympathisé. Samia s’est montrée très gaie, très séductrice.

Le lendemain de mon arrivée à Puerto la Cruz, je rends visite à Julien et Dominique. Revenu à bord, je continue de mettre de l’ordre. Pendant que cuisent les pâtes, je m’attarde sur le dessin de Samia que j’ai choisi parmi ceux proposés. Le sujet est une sculpture, représentant des vieilles chaussures. Mon cœur se serre en examinant le pâteux gribouillage, la puérile application aux détails, l’épaisseur des traits, la violence des couleurs. Elle m’a dit qu’elle se sent comme le peintre de sa vie, pour en faire un chef-d’œuvre. Si sa vie est à cette image… Je me souviens des dessins de Françoise, ceux d’Isabelle. Qu’est-ce qu’elles ont, toutes, avec cette manie de dessiner ? Comme celle des autres, timides ou appliquées, les productions de Samia reflétaient sa personnalité, ici présomptueuse et hardie. Je pense avec tendresse que je mettrai cette horreur dans un cadre, sous verre, et que je l’accrocherai quelque part, si elle vient.

Si elle vient. Je ne suis sûr de rien. Au moment de se séparer, elle a parlé du printemps. J’ai approuvé. J’aurais approuvé tout autant si elle avait proposé la semaine suivante, ou dans un an. J’ai décidé, afin d’en avoir le cœur net, d’être irréprochable, d’applaudir à toutes ses idées, de m’extasier devant ses œuvres, et même de considérer Serge Bilé comme un penseur de haut niveau.

Le lendemain, je prends quelques notes pour mon journal en écoutant les « Variations Diabelli ». J’écris : on a les inspiratrices qu’on mérite. Wagner avait Cosima, Beethoven avait « L’immortelle Bien-aimée ». Moi, j’ai Samia, Isabelle, Françoise.

Puis je vais m’abonner au réseau wifi. Avec une antenne amplifiée, la réception est parfaite. Je prends l’habitude de parcourir le journal chaque matin. L’habitude commence aussi de retrouver Samia chaque jour, sur le net.

 

C'est tout de suite une assuétude, une véritable lune de miel à distance. Moi dans le carré de « Marjolaine », elle chez Rachida, passons plusieurs heures par jour à bavarder. Nous n’avons jamais autant communiqué.

Cela commence, pour Samia, en découvrant le mail que je lui ai envoyé juste avant de me coucher, et qui avec le décalage horaire est reçu chez elle vers trois heures du matin. À midi, elle guette le moment où je suis en ligne, car il est pour moi huit heures du matin. C’est le coutumier « bonjour, mon ange, tu es là ? », auquel répond un « oui mon cœur, comment ça va aujourd’hui ? » ; à moins que ce soit moi qui, voyant le premier que Samia est connectée, lui envoie un : « tu es là, mon amour ? ». Quand l’un tarde à répondre, l’autre envoie un « tu dors ? », deux mots qui sont devenus depuis nos dernières retrouvailles comme une plaisanterie privée.

Ainsi, l’après-midi de l’une, qui est la matinée de l’autre, est ordinairement consacrée à chatter sur Windows Messenger, au rythme du petit carillon qui annonce l’arrivée d’un nouveau message. Le dialogue doit parfois être interrompu. Il y a des courses à faire, ou c’est Djali qu’il faut promener ; ou encore c’est Sandra qui, de retour du lycée, demande l’ordinateur. On se donne alors rendez-vous avec force fausses sorties, chacune accompagnées de douceurs et de smileys, ces figurines ridicules représentant l’état d’âme de l’interlocuteur. Mais ce sont aussi des coupures de réseau, et un message ne part pas au milieu d’une explication. La conversation est interrompue, remplacé par la phrase de couleur rouge sang : « le message suivant n’a pu être remis à tous les destinataires ». Comme s’il pouvait y en avoir plusieurs ! Il arrive que la déconnexion dure longtemps. C’est alors l’angoisse d’un bonheur menacé par les malentendus, le tourment de l’absence, et le soulagement, ensuite, que le lien soit rétabli, que notre entente soit intacte.

Le besoin se fait parfois sentir de se parler de vive voix. Je compose le numéro de Rachida, sur Skype, et c’est l’émerveillement de discuter sans fin malgré la mauvaise qualité de la liaison. Il ne manque que l’image. Je ne sais pas programmer la webcam.

Vers minuit, Samia envoie à son ange un dernier mail que je découvrirai le soir même, où le matin en me levant. C’est un dernier « je t’aime », et des baisers, par milliers, et plus encore, et partout, oui, partout. Ces baisers sont tour à tour tendres, amoureux, veloutés, fougueux ; ou encore, s’appliquant à une phrase bien rondie, elle les veut aussi doux que le réveil qu’elle me souhaite.

C’est aussi le moment des méditations vespérales. Elle s’interroge, s’inquiète : pendant notre séjour à Paris j’ai été adorable, elle ne m’a jamais vu comme ça mais pendant un temps trop court pour apprécier mon changement de comportement. Elle se questionne sur son avenir, et de quoi sera-t-il fait puisque nous ne faisons pas de projets sérieux. Françoise ? Elle a l’impression que je jongle entre elles deux. Quand elle est avec moi, je laisse tomber l’autre, mais lorsqu’elle s’en va, je la fais revenir. Elle aime les choses claires, sans ambiguïté. Elle-même est claire, elle n’a personne, depuis bien longtemps. Elle veut repartir sur de bonnes fondations, elle exige une franchise totale. Je lui ai menti, elle comprend que c’était par peur de la perdre mais elle promet que je la perdrai si je ments encore. Je me défends, et pousse l’indélicatesse jusqu’à lui proposer de prendre connaissance de mon courrier. Je lui donnerai mon code d'accès. Elle refuse.

Mais les reproches comme les inquiétudes sont vite chassés par les tendresses, et bientôt revient l’impatience d’être dans mes bras, de sentir mon corps, de se coller à moi, de me laisser la pénétrer au cœur de sa petite forêt noire. Les propos amoureux suppléent l’originalité par l’intensité, l’éloignement trouvant sa compensation dans l’outrance. Les sentiments, quand ils ne peuvent s’exprimer physiquement, s’exagèrent dans les paroles et les écrits. L’antique mécanisme est toujours à l’œuvre, qu’illustre cette époque où le chemin était long, entre la convoitise et la satisfaction charnelle ; où l’amant palpitant de désir s’exaltait sur le bout d’un escarpin à peine entrevu.

Jamais notre amour n’a rebondi si haut.

 

Je dois quitter le Venezuela. Mon visa arrive à expiration. De toute façon, il me faut revenir dans les Antilles, une dernière fois sans doute. J’avertis Samia que nous resterons plusieurs jours sans nous voir. Je fais mes adieux aux amis, assure ceux de « Varuna » qu’on se reverra bientôt. Je m’arrête deux jours à Margarita, pour les formalités, et un jour aux Testigos, sans même descendre à terre. Puis je fais route sur Grenade au moteur, afin d’arriver plus vite.

Après l’angoisse de cette courte séparation, les conversations quotidiennes reprennent. Séparés par l’Atlantique, on ne se quitte plus. Je plaisante : dans ce cas, est-ce bien la peine qu’elle vienne ? Samia entre dans le jeu, mais redevient tout de suite sérieuse pour me dire que, lorsque son cœur est pris, il n’y a de place pour personne d’autre ; car elle a, dit-elle, le cœur étroit. Alors, je m’enthousiasme des trésors cachés sa personnalité, trésors secrets, bien dissimulés ! Elle s’indigne : il m’a donc fallu tout ce temps pour que je la comprenne ? Et elle se dépeint : comme une personne entière. Elles sont rares, précise-t-elle. C'est peut-être cela qui m’a dérouté, qui a provoqué chez moi une certaine méfiance à son égard, car je n’ai sans doute pas l’habitude de ce style de femme, directe et ouverte. Alors, au lieu de vivre tout simplement le bonheur qui m’est tombé dessus, j’ai commencé à réfléchir, à chercher le pourquoi du comment. Elle aussi, elle est tombée amoureuse de moi tout de suite, elle n’a pas compris ce qui lui arrivait. Avec Béa, elle a déjà vécu cette situation où amour et indépendance se confrontent, elle a choisi son indépendance. Elle en a beaucoup souffert. Elle a tout perdu. Elle a essayé de ne pas reproduire ça, en faisant des concessions, mais visiblement elle n’est pas douée. Elle veut se donner à fond, mais l’amour est un sentiment qu’elle n’arrive pas à contrôler, elle a paniqué. En me voyant réfléchir à sa personnalité plutôt que de savourer les instants présents, elle a commencé à stresser, et pour se calmer elle buvait, alors qu’elle ne boit pas, normalement. Dans sa tête tout se mélangeait, et notre relation était déchirée par ce je t’aime, moi non plus.

L’évocation du passé comme celle de l’avenir est parsemée de pièges. Si j’ai découvert ses qualités seulement maintenant – elle n’a pas besoin que je les dise, elle les connait -, qu’est-ce qui a bien pu m’attirer en elle ? Penaud, j’essaie de m’expliquer : j’ai vu une partie de ses qualités, pour le reste j’hésitais. J’ai pu logiquement supposer qu’elle était une profiteuse. Elle s’insurge : profiteuse de quoi ? À l’heure actuelle, c'est moi qui profite d’une aubaine qui m’est tombée dessus. Et cela ne m’a pas rendu plus intelligent, la preuve !

Elle s’excite : c’est moi au contraire qui lui ai demandé de l’argent, j’inverse les rôles. Posant à la victime indulgente : tout ce qu’elle voulait, c’était naviguer avec une personne qu’elle aimait, j’ai tout gâché avec mes soupçons, mais elle ne m’en veut pas, c’est oublié. Je tente mollement d’endiguer, de mettre de l’ordre et de la chronologie : ce que j’ai pu penser à l’époque, ce n’est pas ce que je pense maintenant. Sans doute a-t-elle, elle aussi, porté quelques jugements sur moi, au début ? Elle rectifie : elle ne porte pas de jugement, elle ne le fait jamais ! Elle fait seulement part de ses impressions… Parsemant mes réponses de « mon chou, mon amour », comme autant d’offrandes propitiatoires, je veux savoir pourquoi, brusquement, elle m’attaque ainsi. Elle s’étonne : « Tu te sens agressé ? ». Diplomatiquement, je reviens sur des bases consensuelles : pourquoi se faire des reproches ? Si elle veut me donner tous les torts dans nos échecs passés, qu’elle le fasse ! Ce qui compte pour moi, c'est aujourd’hui et demain.

Mon ordinateur fait une fantaisie et je vois, sans pouvoir répondre, plusieurs messages se succéder : « Tu es là ? Fâché peut-être ? Tu boudes ? Je t’aime toujours fort. Tu ne réponds pas, je vais promener Djali ». La connexion revient enfin. Je m’explique : je ne suis pas fâché, j’ai passé l’âge de bouder, mais je suis toujours un peu surpris, quand elle montre les dents, brusquement.

C’était peut-être que la vérité n’est pas toujours bonne à entendre. De quelle vérité s’agit-il ? Je suis perdu, et demande de l’appeler au téléphone. Cela tombe bien, Sandra réclame l’ordinateur : elle passe sa vie dessus au lieu de travailler, cette pauvre petite idiote ! Nous convenons que tous deux devons mettre de l’eau dans notre vin. Pas trop quand même ! Je m’accuse de ne pas avoir été assez conscient des concessions qu’elle a faites, mais c’était parce que je la connaissais mal. Je lui demande la permission, la connaissant mieux, de l’aimer mieux. Nous nous quittons encore une fois, ce soir-là, sous une pluie de baisers.

 

Samia réinvente notre histoire, et je garde le cap. J’ai choisi une ligne de conduite. Je m’y tiens. La lenteur de la communication écrite me met à l’abri d’un dérapage. Je pèse mes mots et répète en boucle que mon amour est au moins égal au sien, profond et solide. Nous devons tous les deux considérer notre couple comme indestructible. Elle est ma fée, ma bien aimée, ma princesse, ma reine, mon âme, et les mêmes mots prennent un lustre nouveau en espagnol. Elle regrette de ne pas savoir bien écrire des lettres d’amour, faute d’habitude. Je suis son chou, son cœur, son ange, son poussin, elle est ma dulcinée, elle se caresse en pensant à moi, et me supplie d’éjaculer dans sa bouche. Tous deux tombons d’accord : il faut laisser le passé derrière nous, chasser les mauvaises pensées, oublier les vieilles blessures. Mais nous y revenons sans cesse. Elle a beaucoup réfléchi : pourquoi ça ne fonctionne pas avec moi, pourtant l'essentiel est là : l'amour... Maintenant, elle est contente de me retrouver, elle espère que ça marchera, elle y croit car elle est convaincue qu’elle m’aime.

Notre amour a quelque chose de pur, on est d’accord. Ce que nous éprouvons, c’est beaucoup plus qu’un désir sexuel. Nous avons envie de mieux nous connaître. Jusque-là, nous n’avons pas pris le temps de nous écouter. J’admets mes fautes : j’ai voulu aller à mon rythme, j’ai été trop pressé, je ne lui ai pas laissé le temps, trop impatient que je suis de nature. Je ne retomberai pas dans la même erreur.

D’ailleurs, vivre ensemble, et je pense qu’elle en est d’accord, ce n’est pas forcément vivre constamment collés l’un à l’autre. Ce qui compte, c'est la confiance. Là-dessus, elle minaude, en femme docile : à peine on s’est retrouvé et déjà je parle de séparation ! Ah ! Si c’est comme ça que je vois les choses ! Bon, c’est triste mais elle l’accepte. Je m’empresse d’expédier un rectificatif : je suis impatient de la revoir, même si je ne sais pas quand cela sera possible. Ensuite, nous rattraperons le temps perdu. Elle renchérit : nous allons désormais savourer notre amour tranquillement. D’une même voix, nous nous étonnons : comme on a été bête, jusque-là !

La concrétisation de ce retour reste vague. Samia a parlé d’un délai de cinq ou six mois avant de venir, afin de travailler un moment. Elle est sur la piste d’un boulot intéressant. Elle me met dans la situation de planifier en tenant compte de cet hypothétique calendrier. On est à la mi-novembre, et sa venue se ferait, dans ce cas, en avril ou en mai. Entretemps, « Marjolaine » aura fait route vers l’ouest, vers le Venezuela d’abord, puis Curaçao, puis la Colombie. Ce serait donc à Carthagène ? On continuerait ensemble vers l’archipel des San Blas et Panama, avant de remonter le long de l’Amérique centrale, jusqu’au Guatemala. À moins de passer par le nord, les Îles Vierges, Haïti, Cuba, le Yucatan, et descendre ensuite par le Belize ?

L’achat d’une nouvelle cuisinière devient la source de bêtes plaisanteries. Comme la jeune est un peu plus mince que la vieille, il faut installer des entretoises. Il faut la percer, mais ma perceuse est trop petite, il faut longuement limer dans ses nouveaux trous, enfiler un autre tuyau de gaz, etc. Et que faire ensuite de la vieille, qui encombre, hi hi ! Je la donne à un copain de mouillage. J’apprends par ma sœur aînée, le vingt-huit novembre, que notre mère est morte. Je n’ai pas de quoi débourser le prix du voyage pour aller à l’enterrement. Mon seul chagrin est de ne pas être auprès de Mathilde, qui aimait beaucoup sa grand-mère paternelle. Valentine n’est pas venue aux obsèques, m’écrit Colette.

Mais les futuribles semblent osciller. Les perspectives d’embauche de Samia paraissent toujours plus hypothétiques. Elle ne parle plus de ce poste qu’elle convoitait, proposé par une relation, sans avoir précisé de quoi ni de qui il s’agissait. La France, ce n'est pas pour elle. Cela veut-il dire qu’elle viendra plus tôt ? Dans ce cas, où ? Mais il faut éviter les questions précises, pour qu’elle ne se sente pas contrainte. Je m’adapterai aux circonstances. Je suggère la Martinique : j’y ferais l’avitaillement et nous pourrions nous y retrouver, début janvier par exemple ? L’idée ne plaît pas à Samia. Elle connaît trop de monde au Marin. Elle tombera sur des gens qu’elle ne veut pas voir. Cela lui fera revivre des moments douloureux. Non, ce serait recommencer dans de mauvaises conditions ! Je me dis qu’elle a raison, sans penser que « ces gens », ça peut être l’ « autre ».

Elle cherche des vols à bon marché sur internet, et en trouve pour Cayenne, à trois-cent quatorze euros. Cayenne, ce n’était pas loin de la Colombie. Je fais semblant de prendre cette idée au sérieux, pour ne pas heurter ses sentiments d’indépendance. L’idée est vite oubliée. Je lui propose de se retrouver tout simplement où je suis, à Grenade. Nous repartirons très vite vers le Venezuela. Si elle le désire, elle peut être là dans très peu de temps.

Anticipant le versement trimestriel de la compagnie d’assurance, je calcule que je peux en distraire le coût de son voyage. Je me renseigne. Ce n’est guère plus cher que de venir en Martinique, mais il faut passer par l’Angleterre. Elle ira à Londres avec l’Eurostar. C’est facile, je l’ai déjà fait. La navette pour Heathrow marche très bien. Par délicatesse, je parle d’avancer le prix du billet.

Je veux qu’elle choisisse les dates à son gré, et marque ma confiance en lui communiquant les références de ma carte bancaire. Elle se décide pour le 22 décembre. Nous fêterons ensemble Noël et la nouvelle année, celle de 2009.

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article